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Le « Rituel Pervers » : un mécanisme inconscient très puissant

Le rituel pervers est un mécanisme inconscient qui vise à tenter de nous restaurer d’une fragilité ressentie de nos besoins vitaux : 👉🏼  d’existence,
👉🏼 de sécurité
👉🏼 d’être aimé.

3 besoins permanents qui participent à l’équilibre psychique du sujet. Ils sont vitaux et constituent le trépied de notre construction jusqu’à la fin de notre vie. Dès lors que l’individu s’effondre sur l’un, les deux ou trois de ces besoins, une mécanique de restauration se déclenche. Notre inconscient, alerté par ce déséquilibre majeur, identifie immédiatement un malaise qui, très vite, envahit le sujet jusqu’au point de ne plus être gérable. Ce qui est alors invisible aux yeux du parent, devient visible. L’enfant « traduit », inconsciemment, cette souffrance en un comportement inadapté ou susceptible de le paraître, à son parent.

Le parent « prend le relais ».

L’enfant, se « garantit » donc ainsi une inévitable « réaction » de la part du parent, qui par la même lui « prouve », sans s’en rendre compte, à l’enfant qu’il « u existe ». Il vient de restaurer en un instant, par un mot, une mimique ou encore un sentiment de colère ou d’exaspération, la certitude que l’enfant « existe » à ses yeux. S’il avait des doutes, le voilà restauré. L’erreur fondamentale que le parent commet à cet instant précis, est qu’il fait « exister », voire « sur-exister » (lorsqu’il réagit pour la dixième fois…) un comportement qu’il souhaiterais voir « disparaître » dans le même temps ! Ce qui, reconnaissons le, relèverai de la pure « magie »… La conséquence qui découle de sa réaction, est qu’il va finir pas renforcer le comportement contre lequel il se « bat » et rendre l’enfant plus « fort » au fil du temps…

Le parent répète, cela ne marche pas, mais il continue quand même… 

Habitué à ce comportement que l’enfant produit régulièrement malgré les explications ou les punitions, le parent n’hésite pas une seconde à « entrer en répétitions ». Il réitère, le même message, la même consigne, la même colère que la fois d’avant, et encore avant…

Il est évident qu’à ce stade, l’enfant à parfaitement conscience du fait que ce qu’il fait n’est « pas bien », mais cette conscience apparaît inopérante devant la force de la pulsion inconsciente qui a pris le « contrôle » de son comportement. Il sait qu’il ne faut pas, mais ne peut pas s’en empêcher. C’est d’ailleurs ce qu’ils nous disent lorsque ‘une fois le conflit apaisé, nous leur demandons pourquoi ils recommencent : « je ne sais pas », « je ne l’ai pas fait exprès », « je n’ai pas pu m’en empêcher »…

Ses propres rabâchages indiquent clairement au parent qu’il échoue dans sa tentative de remédiation pour deux raisons : 1- l’enfant recommence le lendemain sur le même sujet, à la même heure de la même façon, 2- si le parent répète c’est bien le signe que cela ne marche pas…

En revanche la « litanie » du parent « v rassure » l’enfant sur une relative stabilité de son environnement. Il se passe bien toujours la même chose… S’il avait des doutes quand à son sentiment de sécurité, le voilà rassuré.

Quand la colère s’en mêle…

Le plus souvent c’est la colère qui prend le dessus chez le parent, excédé. Il arrive cependant qu’il se trouve dans de « bonnes dispositions » et qu’il tente d’apaiser la situation par un câlin. Dans les deux cas, il prouve ainsi à son enfant qu’il w l’aime. Qui aime bien châtie bien… Encore une fois si l’enfant nourrissait un sentiment de désamour, le voici rassuré.

Le rituel est accompli.

Ainsi l’enfant vient de se restaurer de ses trois besoins vitaux par le truchement d’un comportement rituel (inadapté aux yeux du parent) en quelques secondes. Il peut repartir jouer… Le parent, lui, mettra beaucoup plus longtemps à s’en remettre…

A ce stade de notre observation, nous pouvons clairement identifier le thème du rituel et le rituel à proprement parler.

Le thème est toujours constitué d’une attente potentielle du parent à l’égard de son enfant. Ce qui constitue pour ce dernier l’assurance que le parent réagira bien. Le rituel, quant à lui est accompli… par le parent, qui, par son comportement « d’accueil » restaure le socle vital des besoins de l’enfant.

Un rituel trompeur.

Si au premier abord, il semble plutôt utile de constater que l’enfant a à sa disposition un moyen commode et rapide de se restaurer de ses sentiments de fragilité quand à se besoins d’exister, de sécurité et de se sentir aimer, cela ne signifie cependant pas que son impression soit pour autant une réalité. Loin s’en faut ! Il n’est pas rare de se sentir « mal aimé » même à l’adulte sans que cela ne soit vrai pour autant… Le cas échéant, nous conviendrons toutefois qu’il ne s’agit pas là de la meilleure façon de procéder pour se rassurer même si cela « marche très bien », en apparence…

Un rituel « coûteux ».

La première constatation est qu’il se déroule généralement sous la forme d’un conflit entre les deux parties : parent et enfant/ado.

La seconde, laisse apparaître que l’enfant s’oppose sur un comportement (thème) parfaitement connu, compris et intégré depuis longtemps.

La troisième constatation réside dans le fait que l’énergie consacrée de part et d’autre dans l’échange qui s’ensuit, est considérable, irrémédiablement perdue, et inutile puisque le parent répète quelque chose que l’enfant sait déjà et qu’il recommencera probablement quelques jours plus tard ou parfois dès le lendemain, sur le même thème.

Si le propre du rituel est de se rassurer pour continuer à grandir et se construire, ce qui au demeurant paraît plutôt utile, son inconvénient majeur en la circonstance, est que l’énergie consacrée à ce conflit (inutile) finira par manquer quelque part…

La première sphère qui va être impactée par ce manque est généralement celle des apprentissages. C’est à l’école en effet que l’on constate très rapidement, chez l’enfant un manque d’attention et une moindre « disponibilité » à ses apprentissages. Il s’ensuit le plus souvent d’une dégringolade des résultats et d’une baisse sévère de l’appétence. On remarquera l’élève distrait, qui se retourne à la moindre occasion, qui perd régulièrement ses affaires ou les oublie… C’est par ailleurs fréquemment le même enfant qui entretient des relations difficiles avec ses camarades, s’en plaint, s’isole ou devient agressif dans sa communication à autrui… A terme la sphère des apprentissages et celle des relations se trouvent perturbées par un manque de disponibilité ou une inhibition sensible.

Le rituel devient « pervers ».

C’est donc dans ses conséquences, que le rituel va se révéler « pervers ». Cependant il en est une parmi toutes qui retiendra notre attention. Ce rituel « confine » très rapidement l’enfant dans des comportements immatures qui indiquent ses difficultés à grandir. C’est principalement en ce sens que le rituel devient pervers. Il empêche l’enfant de se construire plus paisiblement et plus harmonieusement, au lieu d’y participer. C’est sans compter bien sûr le sentiment d’échec et la culpabilité du parent qui nourrit son sentiment de ne pas être à la hauteur.

Le paradoxe du parent.

Le paradoxe réside donc dans le fait que le parent apporte 3 bénéfices majeurs à l’enfant qui se présente à lui avec 3 « fragilités » correspondantes. On imagine mal dans ces conditions, qu’il renonce à pareil comportement au vu de ce qu’il rapporte…

Non seulement son comportement a toutes les chances de s’ancrer dans le temps, mais le transfert sur d’autres thèmes ne tardera pas à se faire. L’enfant peut ainsi se retrouver aux prises avec un mécanisme qui ne va pas tarder à l’envahir jusqu’à une certaine « dépendance », créant ainsi, toujours inconsciemment, les conditions d’une fragilité devenue nécessaire dans le seul but de les voir restaurées par la personne chargée de ses soins. Le mécanisme pervers qui résulte de cette mécanique tient donc au fait que le parents qui adopte une attitude apparemment logique, qui consiste à redresser ce qui lui paraît « tordu », en réalité l’entretien et le renforce.

Le processus de remédiation consiste en 4 étapes :

  • Désactivation du Rituel Pervers
  • Restauration des besoins vitaux
  • Activer vigilance et discernement
  • Adopter des attitudes d’autorité vs pouvoir

LA DESACTIVATION DU RITUEL PERVERS

Identifier le Rituel pervers.

Comme nous l’avons vu plus haut, il se présente sous la forme d’un comportement inadapté aux yeux du parent. Son thème est généralement une attente récurrente de celui-ci ou une compétence parfaitement intégrée par l’enfant (brossage de dents, s’habiller, se préparer pour l’école, se lever, éteindre son écran, ne pas jurer, ne pas répondre, se mettre en pyjama, venir manger, ne pas déranger papa au téléphone, ranger sa chambre, prendre sa douche, faire ses devoirs, rentrer à l’heure, aller se coucher…). On le voit, la liste est longue…

Certes, l’enfant peut ne pas avoir ponctuellement envie de faire ceci ou cela à l’instant où le parent le lui demande. Sa réponse peut être différée dans le temps de quelques minutes car il est en train de faire autre chose de plus intéressant… auquel cas le parent doit accepter que le temps de l’enfance ne soit pas celui des adultes. C’est à partir du moment où le parent trouve le temps long, qu’il réitère sa demande et qu’il entre dans un état de tension que l’enfant perçoit à son attitude ou au timbre de sa voix… S’il tarde encore à souscrire à la demande, le parent répète, rabâche et s’énerve.

Prenons le cas Cécile qui attend que son fils Arthur, âgé de 11 ans, aille se laver les dents.

Il est 20H30 le repas est terminé et Cécile range la cuisine.

      • Arthur ! Dents, pyjama et couché !

Silence.

      • Arthur !

Silence

Cécile sent la colère monter. Tous les soirs c’est la même histoire. Elle se dirige vers la chambre de son fils et le trouve assis sur le bord de son lit, écouteurs sur les oreilles, musique à fond, rivé sur son téléphone.

      • Arthur !!!

Il tourne la tête nonchalamment et regarde sa mère, manifestement dérangé par cette intrusion.

      • Quoi !?…

Ca fait une heure que je t’appelle ! Tu vas te brosser les dents et tu te couches

      • ouais, je sais…
      • Tout de suite Arthur.
      • Mais, je termine mon message…

Cécile se fait menaçante et s’approche.

      • Tu me donnes ce téléphone et tu vas te brosser les dents !

Arthur résiste, se détourne et tente de poursuivre la rédaction de son sms.

Cécile tente de lui arracher son téléphone des mains, sans succès.

      • Donne moi ca tout de suite !
      • Tu préfèrerais que je sois un enfant isolé qui parle avec personne et qui n’a pas de copains et qui soit complètement dépressif ! C’est ça hein ? Alors dis le ! C’est ca !
      • Arthur ça suffit comme ça ! Maintenant tu arrêtes ton petit jeu stupide et tu te couches !
      • Tu veux que je me couche ou que j’aille me brosser les dents ? y faudrait savoir !…

Elle hurle et lui arrache l’appareil des mains avant de ressortir.

      • Confisqué !!! Je te le rendrai quand tu auras fini !

9H00. Arthur finira par se lever, mais Cécile ne verra pas le petit sourire de son fils lorsqu’il passera devant la porte de la cuisine…

Cet exemple illustre parfaitement le type d’échange que l’on peut observer lors du déroulement d’un Rituel Pervers.

Pour commencer nous voyons dans cet exemple précis que Cécile s’adresse à son fils sur un mode lapidaire qui correspond très certainement à un besoin d’efficacité  et au fait qu’elle a surement beaucoup d’autres choses à gérer. Néanmoins sa manière de communiquer n’en n’est pas moins inadaptée. Que peut ressentir la personne qui en serait l’objet ?

Arthur, inconsciemment adopte une attitude tout aussi pénible pour Cécile. Sa communication répond en tout point à celle qui lui est proposée. Mais où a-t-il bien pu apprendre à communiquer d’une façon si inappropriée ?…

Il n’est bien sûr pas question ici de trouver un coupable ni de porter un jugement sur le parent, mais simplement de se rendre compte comment, sans que nous y prêtions attention, nos enfants apprennent de nous… Juste en nous observant. Arthur « rejoue » en l’accentuant certes, un comportement dont il est lui-même l’objet. Une lecture attentive de la mère pourrait ainsi la renseigner qu’elle a elle-même un effort à faire dans sa manière de solliciter son fils.

Depuis près de 8 années, tous le jours, Cécile demande à son fils d’aller se brosser les dents… soit près de 3000 fois, si ce n’est beaucoup plus ! Peut-elle imaginer un seul instant qu’Arthur ne le sache pas, n’ai pas compris, ou qu’il n’ait pas entendu ? Non bien sûr. Pour sûr, il n’a pas envie. Cela est fort possible, voire probable. En réalité on voit qu’il a bien mieux à faire à ce moment précis…

Lorsqu’il soupire contrarié d’être ainsi dérangé, et lui répond qu’il le ferait à son camarade de classe, Arthur adopte des curseur de communication qu’il a peut être intégré à l’école. Mais il ne perçoit pas la nécessité de changer de niveau de langage dès lors qu’il s’adresse à sa mère, ou tout autre adulte. D’où peut bien venir, une fois encore la raison de ce manquement ? On perçoit qu’Arthur à l’habitude de s’exprimer de la sorte et qu’il n’hésite pas un instant à envoyer bouler sa mère. Cette habitude a probablement été prise à la maison et non à l’extérieur. Arthur parle à sa mère comme il parle à ses copains pour une raison très précise. Cela semble possible. Cécile semble d’ailleurs ne pas s’en offusquer outre mesure… Elle lui répond et poursuit l’échange comme si cela lui semblait normal que son fils s’adresse ainsi à elle. La force de l’habitude sûrement, ou encore la lassitude. Elle ne peut pas se « battre » sur tous les fronts… Cependant encore une fois sans s’en rendre compte, elle « génère » un environnement où cela semble possible, donc très rapidement « normal ».

Cécile entre alors dans une attitude menaçante et tente d’exercer le pouvoir sur son fils. Elle essaie de le contraindre par la force, à obéir. Il fut un temps où cela devait mieux « marcher », mais aujourd’hui Arthur ne la craint plus. Aussi il l’affronte avec un aplomb teinté de manipulation et de mépris qui ne nous échappe pas. En réalité il se joue d’elle en lui retournant des éléments de son propre discours. En d’autres circonstances, cela pourrait prêter à sourire…

Il finit enfin par la mettre face à sa propre contradiction qu’il lui jette à la figure. Non pas qu’il tente de la « détruire » mais par jeu. Son petit sourire narquois marque la fin de la partie. Il ne se sent sûrement pas « grandi » de son attitude, mais il s’en remettra plus vite que sa maman… Il a gagné !

Pour des raisons obscures, Arthur a éprouvé une nécessité impérieuse de se restaurer de ses besoins vitaux. Il lance alors la mécanique de restauration sur un thème « sensible ». Sa mère entre alors dans une « réponse » qui va apporter à son fils trois bénéfices immédiats. Elle u réagit, donc il existe, elle v répète, donc il se rassure, elle w hurle, donc elle l’aime. L’affaire est dans le sac !

Ce conflit, multiplié sur de nombreux autres thèmes finira par les épuiser tous les deux. On imagine mal qu’une telle entreprise soit, à terme, sans conséquences sur la qualité de ses apprentissages et sur la qualité relationnelle d’Arthur.

Un travail de désactivation est un travail unique. Il va dépendre du choix du Rituel, de l’âge de l’enfant des conditions environnementales de la famille. Habite-t-elle dans une maison, un appartement ? Y-a-t-il une fratrie ? Sommes nous le matin ou le soir ? Est-ce au père ou à la mère de désactiver ? Ont-ils des rendez-vous dans la foulée ? Sont-ils chez des amis ? D’autres adultes sont-ils présents ?… La démanche comportementale nécessite la prise en compte de très nombreux paramètres uniques à chaque famille.

L’analyse préalable de ses conditions est donc un travail indispensable à la bonne marche de l’opération. La désactivation consiste à agir sur l’environnement de manière à ne pas donner le choix à l’enfant selon le comportement attendu par le parent. Il ne s’agit en aucun cas de le contraindre ou de le faire obéir. La pédagogie du comportement suit les mêmes principes que celle de l’enseignant qui attend de sa classe que le plus grand nombre procède à un apprentissage précis indispensable et pas un autre. Il élimine donc, dans la situation qu’il propose, tous les facteurs susceptibles de perturber la bonne acquisition.

Un outil plus qu’une méthode.

La désactivation du Rituel Pervers ne relève pas d’une méthode d’éducation mais bien plus de l’outil. Le processus de remédiation ne s’applique donc qu’une seule fois, chez un même enfant et sur un seul comportement identifié comme un Rituel Pervers.

L’objectif est triple :

  • Désactiver la source du comportement afin de le voir disparaître.
  • Permettre « l’archivage » inconscient d’une expérience dissonante.
  • Repositionner le parent dans une attitude d’autorité.

Les conséquences pour l’enfant. 

  • L’allègement de l’ambiance familiale participe à lever une « pression » souvent pesante.
  • Les conflits diminuent très sensiblement.
  • Les comportements de Rituel Pervers disparaissent en cascade par transfert.
  • Réamorçage de l’appétence intellectuelle.
  • Amélioration de l’attention et de la disponibilité aux apprentissages.
  • Amélioration de la relation à autrui.

Le propre d’un outil n’est pas de devenir un mode de fonctionnement. On ne s’en sert que lorsqu’on en a besoin…

Le choix de la « méthode » revient au parent. Nul besoin de conseil pour cela. Chacun est donc libre des valeurs et des principes sur lesquels va se construire le profil éducatif parental.