Parents-freins

Les angoisses de Benjamin

Benjamin a suivi une scolarité primaire confortable. Très bon élève jusqu’au CM2, il a toujours été entouré de bons copains. Cette année, le premier trimestre de la 6ème fait apparaître un très net fléchissement de ses résultats. Contre toute attente, il a perdu tous ses amis et se retrouve seul dans une section où il ne connait personne. Il regrette de n’avoir pas su plus tôt qu’il lui aurait simplement fallu choisir l’italien en première langue pour ne pas être écarté du groupe (!)…
Cette année, Benjamin a pris du poids, rien ne l’intéresse plus, il se renferme et se sent triste. Il consulte sur le conseil de son médecin qui fait état d’angoisses et de difficultés d’endormissement.

Lors de son premier entretien, en présence de sa mère, Benjamin répond par l’affirmative à toutes les questions qui lui sont posées, n’hésitant pas à se contredire ou à se retrancher derrière des je ne sais pas fréquents. Selon lui, tout va bien. Toutefois, il se rassure au fil du temps et finit par s’exprimer plus librement :

 « Le soir, quand je me couche, je n’arrive pas à m’endormir parce que je pense tout le temps que plus tard on travaille beaucoup et longtemps, et on peut plus rien faire quand on est à la retraite… J’ai peur de pas en profiter assez… Après, on s’amuse plus…
J’ai de la peine à respirer, je manque d’air et ça me fait souffler fort… J’ai mal au ventre le matin quand je dois me lever… »
Les symptômes de Benjamin se réveillent le soir au coucher, le matin avant de partir à l’école et le dimanche soir en particulier…
Ses parents travaillent tous les deux. Son père, chimiste, est un homme « puissant ». « Il sait tout, c’est dur d’en savoir plus que lui, c’est le Roi, c’est le gardien de la maison« , précise Benjamin. « Il me dit sans cesse que si je continue comme ça, je vais refaire ma 6ème et que je devrais faire gaffe…« 
Il ajoute qu’il est souvent puni, sur tout. « Alors je reste dans ma chambre et je dis de moins en moins de choses… on finit par se sentir seul… des fois je veux leur dire un truc qu’ils font mal mais ils veulent pas m’écouter et ils comprennent pas bien… à la fin je garde mes trucs pour moi…« 
Sa mère, s’inquiète de la scolarité. Elle s’occupe des devoirs de Benjamin. C’est devenu un moment difficile. Depuis trois mois, elle reconnait qu’elle le harcèle et le punit souvent car il s’est mis à mentir.
Depuis le mois de septembre, Benjamin traverse une période très complexe et difficile pour lui. D’abord isolé de son groupe d’amis, il se renferme rapidement, partage de moins en moins. Ses pensées négatives sur son avenir se nourrissent en partie des multiples avertissements de son père, qui le met régulièrement en garde sur ses risques d’échecs à l’école. Coincé entre un père perçu puissant et une mère inquiète qui le harcèle, Benjamin se retrouve rapidement démuni, seul. Ses conduites reflètent des inhibitions tant relationnelles qu’intellectuelles. Les résultats s’effondrent et alimentent l’inquiétude de sa mère qui renforce sa pression. De son côté, le père, se répand en recommandations plus proches de la menace que du conseil. Benjamin finit par s’isoler dans son monde, impuissant.
Il catalyse les inquiétudes et les colères familiales. Se met à grossir, à mentir et tente comme il peut de se soustraire à lui-même. Il se retranche derrière un Benjamin qui n’est plus le Benjamin qu’on connait, comme pour mieux se cacher, se disculper, d’échapper à la honte qu’il ressent de décevoir ainsi ses parents. Il a le sentiment d’avoir tout perdu et se projette dans un avenir pas plus prometteur. Ses angoisses témoignent alors de la situation de paralysie dans laquelle il se trouve. Il étouffe.

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